La cherté de la destination, l’accès aux crédits par les nationaux, manque
de vision politique, l’absence de promotion, les tracasseries du visa, sont
entre autres les maux qui gangrènent le secteur touristique.
C’est du
moins l’avis des professionnels et acteurs touristiques. Ils l’ont fait savoir
face à la presse hier avant-hier à Saly, pour attirer l’attention du président
de la république attendu à Saly pour inaugurer la saison touristique.
Mise en place de l’ONDTS
Le président de la république arrive le 29 novembre prochain dans la
station balnéaire de Saly pour lancer la saison touristique. Réunis dans le
cadre de l’Observatoire National pour le Développement du Tourisme au
Sénégal (ONDTS), les professionnels et acteurs du tourisme ont tenu, à la veille
de sa venue, à tirer sur la sonnette d’alarme, en exhibant les contraintes
qui plombent le développement du secteur touristique.
« L’ONDTS est une structure provisoire mise en place pour
prendre en charge la relance et le développement du tourisme au Sénégal. Il est ouvert à tous les acteurs, qui gravitent
autour du secteur, quelque soit leur domaine
d’action, » a indiqué d'emblée Mr Mouhamed Fawzou Dème président de
l’ONDTS, qui croit que les acteurs ne sont suffisamment impliqués dans la
gestion du secteur.
Né en 1970 au Sénégal, le tourisme n’a jamais connu d’alternance dénoncent Fawzou et ses camarades. « Aucun ministre n’est issu du milieu
touristique. Et ils ont tous échoué, parce qu’ils ne sont des produits du
tourisme. En plus, le tourisme sénégalais, 2ème mamelle de notre économie, n’est pas géré par des nationaux, » dénonce
le président de l’ONDTS.
Une destination pas compétitive et l'Accès au crédit et aux terres
difficile pour les nationaux
Par rapport à la compétitivité du Sénégal, selon eux, notre pays ne peut
pas aujourd’hui se comparer à des pays comme le Maroc ou la
Tunisie. Parce que nous avons des politiques différentes. « Quand le Maroc
investit 10 milliards pour la promotion de sa destination, et espère avoir 15
millions de touristes d’ici l’an 2015. Le Sénégal en investi 800 millions, encore que cette somme n’est que théorique, pour
espérer avoir 1 million 500 milles de touristes en 2015. Encore que Les
capacités des Aéroports sont loin d’être comparables. Lorsque le Sénégal
fait 9000 vols internationaux par an, le Maroc reçoit
50 000 vols par an. C’est dire que les ambitions sont complètement
différentes, » souligne Pathé Dia DG Hôtel Teranga Saly. Pour lui, Les
infrastructures hôtelières au Maroc sont de loin plus supérieures à ce qu’on
trouve au Sénégal. Parce qu'à l’en croire, les investissements sont
régulièrement renouvelés dans ce pays, du fait de l’accès facile aux crédits
Contrairement au Sénégal où l’accès aux crédit est extrêmement difficile pour
les nationaux. Les nationaux n’ont pas de contre garantie leur permettant
d’accéder aux financements, selon eux. « Ce qui nous intriguent
davantage, c’est que les 90% du parc hôtelier appartiennent à des étrangers. Et
le financement a été fait par les banques nationales. Or ce sont nos impôts qui
fiancent ces investissement là, » blâme Pathé Dia.
Aussi, ils dénoncent également les difficultés que les nationaux éprouvent
pour accéder aux terres. « Lorsque nous faisons une demande pour 7 ou 8
ha, en tant que sénégalais on nous pose la question qu’en ferez-vous ? Et
si c’est un étranger, c’est tout de suite accordé. On a moins confiance en
l’expertise locale, qu’en celle étrangère, » regrette t-il. Pourtant au
finish, constate t-il, l’essentiel du travail est fourni
par les sénégalais employés par les étrangers.
Destination onéreuse
Dans un autre registre, les professionnels du tourisme dénoncent la cherté
de la destination Sénégal. Avec la crise mondiale, en France par exemple, les
touristes vont avec 800 ou 1000 euros devant un « Tour Operator »
(TO) pour demander une destination Soleil. Le Sénégal, étant la destination la
plus proche (5H de vol), est d’office isolé du fait de sa destination chère.
« Il faut aller au-delà de 1200 euros pour que le Sénégal puisse
concourir. Malheureusement, il existe tellement d’autres destinations beaucoup
plus luxueuses, exotiques que le Sénégal, qui arrivent à sortir à 1200 euros ou
moins sur le marché européen. Ce qui fait que le Sénégal ne peut plus se
positionner, » relève Pathé. A en croire, les membres de
l'ONDTS, aujourd’hui, de Paris à Casablanca, avec 500 euros on peut
séjourner en couple dans un hôtel 5 étoiles en pension complète avec boisson
incluse. Or, il faut 1200 euros pour venir passer une semaine en demi-pension
au Sénégal. Parce que les taxes sont excessivement chères. Une anecdote
racontée par Pathé Dia, pour étayer son argumentaire. « Il nous arrive
très souvent que des compagnies nous offrent des billets d’avions pour
aller assister à des manifestations à l’extérieur. Dans ces cas, nous payons
les taxes qui s’élèvent à 230 000frs Cfa. Or, 230 000frs cfa
équivaut à 400 euros, le prix d’un voyage d’une semaine en Tunisie. « On
ne peut pas concurrencer ces marchés. Rien que la taxe sur les billets d’avion
vaut un séjour dans ces pays, » indique t-il. Selon eux, le Sénégal est
sur le même pied que la Tanzanie, le Kenya ou Bally, qui sont à 9H, 10H, 12H de
vol de Paris, qui sont des destinations beaucoup plus exotiques, qui offrent
plus de possibilités au client, qui valent 1200 à 1500 euros sur le marché
français. Le Sénégal fait partie des destinations les plus chers. Pour eux,
’Etat doit revoir la structure des prix de la destination, et les tracasseries
subies par les visiteurs, notamment la lenteur dans la délivrance des visas et
ses modalités d’obtention.
Mauvaise promotion de la destination
En ce qui concerne la promotion de la destination, l’ONTDS pense
qu’elle doit être faite par les sénégalais eux-mêmes au niveau des pays
émetteurs. « La destination sénégalaise est uniquement vendue par des
étrangers. Les nationaux doivent avoir des TO, qui leurs sont propres, »
estiment les collègues de Fawzou. « On ne peut pas promouvoir une
destination sans bureau à l’étranger. On n’a plus de bureau à Paris, aucun en
Italie, ou en Espagne. Nous avons un bureau à Atlanta. Or les touristes
américains viennent juste pour une visite culturelle partir à l’Île de
Gorée, et ils sont généralement en circuit, » renchérit Pathé Dia. Pour
eux, sur les champs Elysées on y trouve le Maroc, la Tunisie, l’Afrique du Sud,
le Kenya, et la Tanzanie. Et pourtant, c’est l’une des avenues les plus chères
du monde. « Nous, nous ne demandons pas d’être sur les Champs Elysées.
Mais, nous devons à avoir au moins un bureau à Paris dirigé par des sénégalais,
avoir une représentation en Italie, en Espagne, en Allemagne, en Belgique, en
Hollande, » réclament t-ils.
Le "All Inclusiv" à bannir
Ils ont également fustigé le système "All Inclusiv", et soulevé
la rareté de certains clients. « Avant, il y avait beaucoup de touristes
scandinaves, et allemands à Saly. Actuellement ils ne viennent plus. Seule la
France nous reste. Or la France n’est pas le premier pays émetteur, sinon c’est
le plus faible, » soulignent-ils, tout indiquant que la Gambie est
essentiellement remplie par des scandinaves, des britanniques, qui ont un pouvoir d’achat plus élevé que celui des français. « Les français nous
poussent à la paupérisation de notre tourisme. C’est-à-dire toujours demander
toujours moins cher et en « All Inclusiv », où l’essentielle de la
destination est payée à partir de l’Europe, y compris, la boisson. Ce qui fait
que ce tourisme de masse finalement ne rapporte absolument rien. « En
pension complète, le tourisme qui a payé en "All Inclusiv", ne fait
plus d’excursion. S’il sort, il perd sa journée parce qu’il a tout payé depuis
l’Europe, » condamnent-ils. De leur avis, ce touriste ne fait que de
petites excursions d’une demi-journée sans retombées significatives pour les
sénégalais. Alors qu’avant le client généralement n’avait qu’une demi-pension.
Il avait le temps de sortir, de manger dehors de faire des dépenses dehors, de
passer toute une journée dehors et revenir le soir dîner à l’hôtel.
« Malheureusement, les nouvelles autorités s’orientent encore vers la
France. Pourquoi ne pas explorer l’Angleterre, revenir sur l’Allemagne, et
reprendre la destination scandinave," proposent-ils avant de tendre la
main à Macky Sall. "Nous espérons que le chef de l’Etat, qui est de notre
génération et qui connait bien les maux qui gangrènent le tourisme, verra
avec nous les solutions idoines pour relancer et booster le secteur
touristique, » souhaitent les membres de l’ONDTS.
Source Grand Place
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